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L’Afrique de l’Ouest accuse encore un retard en matière de politiques de santé, d’équipements, de personnels et de traitements. Si le déploiement des infrastructures et la formation du personnel de santé figurent parmi les priorités du continent, la révolution digitale offre de nouvelles perspectives. Ces dernières permettent de connecter les populations à de nouvelles offres de soins.

VIVIANE DIATTA

En Afrique subsaharienne, les politiques sanitaires font face à d’énormes défis. Selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), c’est en effet dans la sous-région que le rapport médecin-habitant est le plus faible au monde. Soutenue par une importante croissance démographique, la demande médicale peine donc à trouver les réponses adéquates. Spécialisé dans l’informatique médicale, El Hadji Babacar Fall éprouve une certaine fierté après que les autorités sénégalaises ont validé et adopté son système d’information médical utilisable aujourd’hui dans les hôpitaux, cliniques et tout autre établissement sanitaire désireux de surfer sur le digital. L’expert, interrogé sur les défis de la santé digitale en Afrique de l’Ouest, est convaincu que la sensibilisation est nécessaire pour convaincre de l’utilité des technologies au service de la santé. “Nous devons prendre davantage conscience de l’importance du numérique et de sa plus-value dans nos sociétés”, dit-il.  En raison de l’impact démontré de l’expertise, la solution est implantée à l’hôpital Principal de Dakar et à l’hôpital militaire de Ouakam. A l’en croire, ce dernier établissement sanitaire va être le premier à être 100 % numérisé en Afrique de l’Ouest avec tout l’hôpital interconnecté.

La technologie qu’El Hadj Babacar Fall met à la disposition des personnels de santé et des directions permet de prendre en charge plusieurs volets du travail. Elle permet de numériser les factures, gérer le stock d’une pharmacie ou encore digitaliser le dossier patient. Ce point est d’une grande importance aux yeux du spécialiste persuadé que l’utilisation de la technologie dans la santé permet de gagner du temps, garantir une meilleure transparence et économiser d’importantes ressources financières. Par ailleurs, prévient-il, la transparence dans la gestion de la santé ne cessera d’être une priorité dans la mesure où ce sont de gros marchés qui sont en jeu. En tenant compte du respect des standards internationaux et de l’adaptation des solutions proposées aux Africains, El Hadj Babacar Fall ne ménage jamais ses arguments pour un marché unique dans le domaine de la santé. C’est si crucial de son avis que les expertises locales doivent tisser des relations en vue de mieux communiquer.

‘’Le numérique va bientôt prendre une place importante dans les habitudes des patients’’

Selon le ministre de la Santé et de l’Action Sociale, le manque de financement, de formation et d’infrastructures sont autant d’entraves à une prise en charge de populations inégalement réparties sur les territoires. De l’avis de Docteur Marie Khemesse Ngom Ndiaye bien que le nombre d’institutions publiques et privées œuvrent à l’élaboration des politiques de santé, c’est parfois la prise en charge opérationnelle finale qui peut poser problème. C’est ce que l’on appelle la problématique du ‘’last mile ‘’, ou du dernier kilomètre. C’est-à-dire, que, explique-t-elle, même lorsque certaines régions sont opérationnelles d’un point de vue sanitaire et que tout semble exister dans la chaîne de délivrance, le dernier kilomètre peut encore faire défaut. 

La véritable question sanitaire, soutient la Directrice générale des Etablissements de Santé, serait donc, au final, celle de l’accès aux soins et à l’information, ou plus précisément celle du déficit d’offre adéquate de prise en charge au regard de la structure de la population et de ses territoires. ‘’L’Afrique compte actuellement 24% des malades dans le monde pour seulement 3% de l’effectif mondial des professionnels de santé. En zone subsaharienne, ce sont seulement 145 000 médecins recensés pour une population de 821 millions de personnes. Mais bien que les efforts de formation doivent perdurer, les innovations technologiques apportent, elles aussi, sur ce point, des solutions inédites’’, explique Docteur Fatou Mbaye Sylla. Ces dernières permettent en effet, poursuit-elle, de connecter les populations à de nouvelles offres de soins. Une autre façon donc de résorber ce ‘’last mile’’, par la réintégration des populations via les outils numériques, et ce grâce au secteur de l’e-santé.  Elle estime que les besoins en prévention sont nombreux et en appellent tous à de vastes campagnes de sensibilisation. Qu’il s’agisse d’initiatives étatiques ou du fait de partenaires privés, les dîtes campagnes sont prioritairement relayées via les plateformes mobiles. Une réelle opportunité puisque le continent compte de plus en plus d’utilisateurs de smartphones.

En effet, la GSM Association estime que d’ici 2025, il y a aura au moins 634 millions d’utilisateurs de mobile en Afrique subsaharienne. ‘’Avec un meilleur taux de couverture, un développement de la 4G et une réduction du coût de la data en perspective, le numérique a déjà pris une place importante dans les habitudes des consommateurs, mais aussi bientôt dans les habitudes des patients. C’est pourquoi les développeurs africains s’emparent de l’e-santé pour suppléer aux lacunes sanitaires’’ rassure Professeur Abdou Kane président de l’association sénégalaise de cardiologie.  Il cite l’exemple de l’application ‘’Prévention Ebola’’ qui a été lancée en pleine épidémie pour informer les gens sur le virus dans plusieurs langues locales.  Pour lui, la fonctionnalité doit être assurée autant que l’intégrité des données ainsi que leur confidentialité sans altérer les facilités d’utilisation pour le personnel médical.

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