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Au Sénégal, l’immunité parlementaire est une disposition inscrite dans la Constitution. La question de la levée de l’immunité parlementaire soulève des débats passionnés, mêlant considérations juridiques et politiques.

Le député Farba Ngom est aujourd’hui sous le coup de la justice. Le ministre de la Justice, Ousmane Diagne, a saisi l’Assemblée nationale pour demander la levée de son immunité parlementaire. Bien que les motifs de cette demande soient différents, cette situation rappelle des précédents tels que l’affaire Khalifa Sall ou celle d’Ousmane Sonko. À noter que si la légalité de l’immunité parlementaire ne fait pas débat, la procédure est souvent critiquée pour son non-respect et ses motivations, perçues comme politiques dans de nombreux cas.

Fondement constitutionnel

La Constitution de 2001, en vigueur aujourd’hui, prévoit l’immunité parlementaire sous certaines conditions. Son article 61 stipule que « Aucun député ne peut, pendant la durée de son mandat, être poursuivi, recherché, arrêté, détenu ou jugé à l’occasion des opinions ou votes émis par lui dans l’exercice de ses fonctions. » Ce principe garantit la liberté d’expression et d’action des parlementaires dans leur travail législatif sans crainte de représailles judiciaires.

Cependant, il convient de distinguer l’irresponsabilité et l’inviolabilité. La première protège les parlementaires pour les actes accomplis dans le cadre de leurs fonctions (opinions, votes, interventions en séance), tandis que la seconde interdit de poursuivre un parlementaire pour des infractions commises en dehors de ses fonctions sans autorisation préalable. Toutefois, en cas de flagrant délit, l’inviolabilité ne s’applique pas. Dans ce cas, le parlementaire peut être arrêté immédiatement, mais l’Assemblée nationale doit en être informée rapidement.

Le défi réside dans la nécessité de renforcer la confiance des citoyens envers les institutions. Une levée d’immunité doit être perçue comme un acte visant à garantir l’égalité devant la loi et non comme une manœuvre politique. Cela exige une justice indépendante, un cadre légal solide et l’engagement des parlementaires à privilégier l’intérêt général au détriment de leurs intérêts personnels ou partisans.

Quelle est la procédure ?

Après la saisine du ministre de la Justice, le bureau de l’Assemblée nationale se réunit pour examiner la demande. Une commission ad hoc est ensuite mise en place pour étudier la demande, comme prévu ce mercredi, suivie d’une séance plénière le vendredi pour statuer sur la levée de l’immunité parlementaire de Farba Ngom.

La levée de l’immunité parlementaire est encadrée par des règles précises, prévues par les textes législatifs et réglementaires. Une fois la demande formulée par le ministère de la Justice et transmise au président de l’Assemblée nationale, la commission ad hoc auditionne le parlementaire concerné et analyse les éléments fournis par l’autorité judiciaire. Enfin, le rapport de la commission est soumis à un vote en plénière. Une majorité simple des députés présents est nécessaire pour lever l’immunité.

Les articles 51 et 52 de la Constitution illustrent l’équilibre recherché entre la protection des prérogatives parlementaires et la préservation du principe de justice. Cependant, leur application suscite parfois des controverses, notamment lorsqu’elle semble influencée par des considérations politiques. Ces articles rappellent l’importance d’une séparation rigoureuse des pouvoirs pour renforcer la crédibilité des institutions démocratiques et prévenir tout abus ou instrumentalisation des procédures légales.

Un outil pour neutraliser des opposants politiques ?

L’immunité parlementaire est souvent perçue au Sénégal comme un moyen pour certains élus d’échapper à la justice. Certains abus sont relevés, notamment pour des faits de corruption, de détournements de fonds publics ou d’autres infractions graves.

De plus, la procédure de levée d’immunité est parfois considérée comme un instrument pour neutraliser des opposants politiques, comme dans les affaires Khalifa Sall et Ousmane Sonko.

Lors des dernières législatives, plusieurs personnalités politiques, dont Farba Ngom, Amadou Ba, Aïssata Tall Sall, Abdou Karim Sall, Macky Sall et Cheikh Oumar Hanne, qui ont occupé de hautes fonctions dans l’organigramme de l’État, ont manifesté leur intérêt pour des postes de députés à l’Assemblée nationale. Une partie de l’opinion publique, notamment leurs adversaires politiques, y a vu une tentative de se protéger grâce à l’immunité parlementaire.

En réponse à ces accusations, Abdou Mbow (député), Zahra Iyane Thiam (ancienne ministre) et Amadou Ba (ancien Premier ministre) ont défendu leur position, affirmant qu’un ancien ministre pouvait légitimement servir son pays à l’Assemblée nationale. « Avec votre majorité écrasante, vous pouvez lever l’immunité parlementaire de n’importe qui sur commande », avait répliqué une ancienne ministre de l’Économie sociale et solidaire lorsque l’absentéisme de son mentor à l’hémicycle avait été critiqué.

Yandé Diop

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