0 5 minutes 3 ans
L’Assemblée nationale du Sénégal a adopté, ce vendredi 25 juin, en procédure d’urgence, la loi numéro 10/2021 modifiant la loi numéro 65-60 du 21 juillet 1965, portant code pénal.

Cette loi, selon les autorités sénégalaises, participe à lutter contre le terrorisme. A en croire l’opposition, les autorités veulent réduire les libertés de manifester. C’est ainsi qu’est née la polémique, ponctuée d’échanges salés entre les deux camps, allant de l’invective aux coups de poing. La question de la lutte contre le terrorisme a été malheureusement politisée. Le danger, imminent, embrasse un champ bien plus large et bien plus important que les basses questions de préséances et de côte d’amour électorale. C’est la société qui fabrique ses propres terroristes.

Une déchéance sociale due à l’échec de l’école

Inutile de chercher nos mots, l’école publique sénégalaise a perdu son lustre d’antan. Elle qui est l’âme de l’égalité des chances, en est réduite à former une « lumpun intelligentsia » désespérée. Des jeunes qui ont carburé pour arriver à l’université, se retrouvent dans une impasse. Un sentiment d’incertitude qui enfante un sentiment de révolte.

Cette jeunesse, malheureusement, vit dans une perpétuelle pression à différentes échelles, partant de la famille et s’élargissant à toute la société. Un nouveau monde qui limite la notion de réussite à la situation financière de l’individu. Le seul qui aura réussi, donc digne d’être considéré, est celui qui saura amasser le maximum d’espèces sonnantes, que dis-je, klaxonnantes, et trébuchantes. Une situation qui en a fait trébucher plus d’un, du voleur à la sauvette au voleur VIP de la Fonction publique qui détourne le bien commun. En réalité, la question de l’argent va jusqu’à poser un problème existentiel. Nombreux sont ceux qui se sentent habités par un sentiment d’inexistence. Comme cet enfant qui, à cause de la venue d’un nouveau-né, se sent délaissé, exclu et aura tendance à attirer l’attention de ses parents pour exister. Et malheureusement, il ne le fait pas de la plus belle des manières. Pour la plupart, la défiance est le mot d’ordre.

Des lois à défier

Les lois sont faites pour être transgressées, défendait Spinoza. Une manière de décrier l’insuffisance de ces textes à l’imperfection bien humaine. La transgression de ces lois par les citoyens peut aussi être un moyen pour se faire entendre. Et ceci semble être la voie la plus pratique pour évoluer dans cette société. Aujourd’hui, une personne condamnée pour viol peut être exposée à outrance sur les chaines de télévisions et donnée même en exemple parce que disposant d’un carnet d’adresses et d’un pouvoir d’achat au-dessus de la moyenne. Au même moment, un autre présumé violeur, anonyme,  peut croupir en prison dans l’attente d’un Abjugement. Un exemple d’inégalité parmi tant d’autres pour montrer à quel point la justice est à double vitesse.

Aux injustices sociales et économiques s’ajoute l’effondrement de l’autorité étatique. Cet État qui par un excès de politique populiste s’est installé dans une déchéance dont il peine à sortir.

C’est ce cocktail qui fait le lit du terrorisme. Oui, le Sénégal a intérêt à prendre les devants dans la lutte contre le terrorisme. Pas seulement en durcissant des lois… La vraie solution réside dans la réduction des inégalités sociales et dans la quête d’une justice équitable, dans la restauration de la dignité républicaine et dans la grandeur du sentiment national.

Parce que le terrorisme n’est rien d’autre qu’une forme de grand banditisme, habillée d’idéologie, qui règne lorsque rien ni personne n’est plus digne de considération… Pour répondre à la violence de l’indifférence officielle.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *